Mycoplasma synoviae et ampoules de bréchet : encore une souche tunisienne résistante à la tylosine et à ses dérivés !

Un lot de dindes de chair mâles a présenté un taux élevé (20%) d'ampoules de bréchet détectées à l'abattoir (début de l'abattage réalisé à 105 jours d'âge, octobre 2016, Tunisie). Le lot précédent de dindes chair élevé dans le même bâtiment avait révélé la présence d'Ornithobacterium rhinotrachealae (ORT) et de Mycoplasma synoviae (MS). Une chimioprévention avait alors été mise en place dans l'élevage sur ce nouveau lot, alternant l'usage de tilmicosine (20 mg/kg PV/jour), de doxycycline(10 mg/kg PV/jour) et de tylosine (50 mg/kg PV/jour), notamment après le départ des femelles (J80), période critique dans l'élevage des dindes chair.

Les prélèvements microbiologiques réalisés sur ce dernier lot de dindes chair atteint d'ampoules de bréchet n'ont pas permis de mettre à nouveau un ORT en évidence (technique PCR utilisée), mais, en revanche, une souche de MS détectée par PCR a pu ensuite être mise en culture afin de réaliser une CMI (Concentration Minimale Inhibitrice) pour évaluer sa sensibilité vis-à-vis de la tétracycline, de la doxycycline, de la tiamuline, de la tylosine et de la tilmicosine.

Les résultats de cette analyse, réalisée par le laboratoire Bio Chêne Vert (groupe Finalab) sont présentés dans le tableau ci-dessous :

 

ANTIBIOTIQUE

C.M.I. (microgrammes/ml)

Concentrations Critiques

TETRACYCLINE

0,25

**4-8

DOXYCYCLINE

0,25

**4-8

TIAMULINE

0,125

*1

TYLOSINE

4

*1

TILMICOSINE

128

***

* : concentrations critiques proposées par le fabricant de la molécule

** : concentrations critiques proposées par le Comité Français de l'Antibiogramme

*** : concentrations critiques non indiquées par le fabricant de la molécule

Ces résultats mettent en évidence la sensibilité de cette souche de MS aux cyclines et à la Tiamuline, et la résistance de cette même souche à la tylosine et à la tilmicosine (NB : pas de concentrations critiques proposées par le fabricant de la tilmicosine, mais impossibilité, de facto, d'atteindre la CMI de 128 microgramme/ml en élevage avec les posologies habituelles).

 

Ces résultats amènent quelques commentaires :

- sur le plan de la sensibilité des souches de MS isolées en Tunisie : la tiamuline demeure la seule molécule pour laquelle aucune souche de MS (ni de MG) n'a été détectée comme étant résistante. Ceci est probablement la conséquence de deux facteurs :

  • Tout d'abord, la caractéristique intrinsèque de la tiamuline, molécule pour laquelle l'apparition de résistances est assez rare (Cf travaux de Valks et Burch présentés lors du Congrès de laWorld Veterinary Poultry Association, Cairo, Egypt, January 2002 p.322)
  • Ensuite, un usage strictement encadré par un monitoring PCR des lots traités dans le cadre des élevages suivis par le programme MATRIX de Ceva Santé Animale Tunisie.

- sur le plan de la résistance des souches de MS à la tylosine et à ses dérivés : ce n'est pas la première souche de MS ou de MG détectée comme résistante à la tylosine et ses dérivés. On peut sans doute y voir ici les conséquences d'un usage historique débridé et non contrôlé de cette molécule en Tunisie, administrée selon les conseils du principal fabricant pendant plus de 30 ans à des doses filées et infra-thérapeutiques, et aujourd'hui à l'origine de la sélection de souches résistantes.

 

Plus généralement, les préconisations purement commerciales de protocoles anti-infectieux, conduisent toutes, inexorablement à l'apparition de souches résistantes et donc à des échecs thérapeutiques. La préservation de l'efficacité des molécules antibiotiques est a contrario, intimement liée au recours au laboratoire d'analyses afin de pouvoir évaluer en temps réel l'efficacité des traitements proposés.

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